Selon la Convention sur la diversité biologique, la biodiversité comprend « la variabilité parmi les organismes vivants de toutes origines […] et la diversité au sein des espèces, entre les espèces et entre les écosystèmes ». Elle s’organise donc selon trois niveaux hiérarchiques — génétique, spécifique et écosystémique — qui interagissent constamment.

Cette approche systémique est essentielle pour comprendre la complexité du vivant :

  • la diversité génétique permet aux organismes de s’adapter aux changements environnementaux ;
  • la diversité spécifique structure les interactions biotiques entre espèces ;
  • la diversité écosystémique assure les grands équilibres fonctionnels de la biosphère.

L’érosion actuelle de la biodiversité, attestée par les rapports du GIEC (2022) affecte ces 3 niveaux simultanément. Fragmentation des habitats, pollution, réchauffement climatique et introduction d’espèces exotiques entraînent un effondrement des populations animales et végétales, compromettant la stabilité écologique globale.

La diversité écosystémique : la trame vivante des milieux

1. Définition et fonctionnement

La prédation fait partie d'un processus écologique au même titre que la pollinisation ou la photosynthèse.

La diversité écosystémique correspond à la variété des habitats naturels et semi-naturels, ainsi qu’à la diversité des interactions entre les composantes biotiques (vivantes) et abiotiques (non vivantes) du milieu. Elle englobe l’ensemble des écosystèmes terrestres, aquatiques et marins : forêts, prairies, zones humides, dunes, montagnes, bocages, rivières, étangs, etc.

Chaque écosystème est une unité fonctionnelle où circulent matière et énergie selon des processus écologiques tels que la photosynthèse, la décomposition, la pollinisation ou la prédation. La diversité écosystémique est donc fonctionnelle avant d’être comptable : ce qui importe, ce n’est pas seulement le nombre de milieux, mais aussi la variété des fonctions écologiques qu’ils remplissent.

Cette diversité constitue la base des services écosystémiques rendus à l’humanité :

  • services de régulation (climat, eau, pollinisation, régénération des sols) ;
  • services d’approvisionnement (nourriture, bois, gibier, fibres) ;
  • services culturels (patrimoine, loisirs, paysages).
Près de 30 000 hectares d’espaces naturels et agricoles disparaissent chaque année.

2. Menaces sur la diversité des écosystèmes

Depuis la révolution industrielle, la diversité des milieux s’est considérablement réduite. L’artificialisation des sols et l’intensification agricole ont fragmenté les paysages et simplifié leur structure écologique. En France, selon le Ministère de la Transition écologique (2023), près de 30 000 hectares d’espaces naturels et agricoles disparaissent chaque année au profit d’infrastructures.

Les zones humides, essentielles à la régulation hydrologique et à la reproduction de nombreuses espèces, ont perdu près de 64% de leur surface mondiale depuis 1900. Les forêts naturelles, quant à elles, sont souvent remplacées par des peuplements monospécifiques de production, réduisant leur diversité structurelle. À ces pressions s’ajoute le changement climatique, qui modifie la répartition des espèces, bouleversant les chaînes alimentaires.

Les chasseurs jouent un rôle concret dans la gestion des écosystèmes.

3. L’action des chasseurs pour la diversité écosystémique

Les chasseurs, par leurs activités de terrain et leurs actions collectives, participent activement à la gestion et à la restauration des écosystèmes. Leur approche repose sur la conviction que le maintien de la faune sauvage nécessite des milieux diversifiés et connectés.

  • Aménagement et restauration des habitats

Les fédérations départementales et régionales des chasseurs consacrent chaque année plusieurs dizaines de millions d’euros à la restauration d’habitats. Ces actions concernent notamment :

-> Les haies et bocages : via le programme Sensibilis’haie, les chasseurs replantent des kilomètres de haies champêtres, essentielles pour les oiseaux, les micromammifères et les insectes pollinisateurs. Une haie relie les milieux, sert de refuge et de couloir de déplacement, contribuant à la Trame verte et bleue nationale.

-> Les zones humides et mares : la Fédération des chasseurs du Nord ou de la Somme, par exemple, a restauré des milliers de mares pour la reproduction des amphibiens et des canards. Ces petits points d’eau soutiennent la biodiversité aquatique et améliorent la qualité hydrologique des bassins versants.

-> Les prairies fleuries et jachères faunistiques : implantées sur les territoires agricoles, elles fournissent une ressource alimentaire et un habitat de reproduction pour le petit gibier et de nombreuses espèces non chassables.

  • Maintien des continuités écologiques

Le programme Ekosentia, coordonné par la FNC et validé par l’OFB, illustre la contribution cynégétique à la connectivité écologique. En 2024, 172 projets de corridors ont été validés, représentant plus de 13 millions d’euros mobilisés. Ces corridors ( haies, bandes boisées, passages à faune) assurent les déplacements d’espèces entre habitats isolés.

  • Lutte contre la pollution et l’artificialisation

Les chasseurs participent à des actions de sensibilisation et de dépollution telles que J’aime la nature propre, qui mobilise chaque année des dizaines de milliers de bénévoles pour collecter les déchets en milieux naturels. Ces actions contribuent directement à la qualité écologique des écosystèmes et à la sensibilisation du grand public.

En somme, à travers ces programmes, les chasseurs jouent un rôle concret dans la gestion des écosystèmes : ils restaurent les milieux, favorisent la connectivité, limitent la fragmentation, et soutiennent les écosystèmes.

La diversité spécifique : richesse et équilibre des espèces

1. Définition et rôle écologique

La diversité spécifique (ou diversité des espèces) désigne la variété des espèces présentes dans un espace donné, ainsi que la distribution relative de leurs effectifs. Elle se mesure par deux indicateurs :

-> la richesse spécifique (nombre d’espèces) ;

-> l’équitabilité (équilibre des effectifs entre espèces).

Chaque espèce occupe une niche écologique et contribue à des fonctions spécifiques : pollinisation, décomposition, régulation des proies, etc. La diversité spécifique soutient la stabilité des écosystèmes : plus les espèces sont nombreuses, plus le système est résilient face aux perturbations.

2. Facteurs de déclin de la diversité spécifique

Le déclin des espèces s’accélère. On estime que 25 % des espèces évaluées sont menacées d’extinction. En Europe, les oiseaux des milieux agricoles ont perdu plus de 35 % de leurs effectifs depuis 1990. Les causes sont multiples :

-> destruction des habitats ;

-> pesticides et pollution ;

-> introduction d’espèces invasives ;

-> surabondance de certaines espèces généralistes (corvidés, sangliers) ;

-> changement climatique modifiant la disponibilité des ressources.

Les chasseurs transmettent chaque année des milliers d’observations d’espèces.

3. L’action des chasseurs pour la diversité spécifique

Les chasseurs interviennent à plusieurs échelles de gestion pour préserver, restaurer ou réguler les populations d’espèces, qu’elles soient chassables ou non.

  • Gestion adaptative et suivi scientifique

La chasse française repose sur une gestion adaptative fondée sur des données scientifiques. Les plans de chasse, instaurés en 1963, permettent de réguler les populations de grand gibier selon les objectifs écologiques locaux (densité, équilibre forêt-gibier). Les indices de changement écologique (ICE) développés par l’OFB et les fédérations, fournissent des séries de données sur les tendances des populations.

Cette connaissance contribue à la surveillance de la faune sauvage au bénéfice de la science. Les chasseurs transmettent chaque année des milliers d’observations d’espèces, alimentant des bases nationales utilisées pour le suivi de la biodiversité.

  • Protection et restauration du petit gibier de plaine

Les actions Agrifaune, menées conjointement par la FNC, l’OFB, la FNSEA et les Chambres d’agriculture, encouragent des pratiques agricoles favorables à la faune : implantation de jachères fleuries, maintien de bandes tampons, diversification des cultures, réduction des intrants chimiques. Ces mesures profitent autant au faisan et au perdrix rouge qu’à des espèces protégées comme la caille des blés.

  • Régulation des espèces invasives et déséquilibrantes

Certaines espèces exotiques envahissantes (EEE), comme le rat musqué, le ragondin, la bernache du Canada ou le raton laveur, exercent une pression sur les espèces locales. Les chasseurs, dans le cadre des arrêtés préfectoraux ou des plans de lutte départementaux, participent à la régulation de ces populations, contribuant ainsi à la protection des espèces indigènes.

La régulation du sanglier, dont la surpopulation entraîne des dégâts agricoles et écologiques, illustre ce rôle de la chasse qui est une mission de service public : maintenir un équilibre entre les densités animales et la capacité d’accueil du milieu.

  • Coopération et suivi d’espèces rares

Dans plusieurs régions, des chasseurs collaborent avec des scientifiques pour le suivi du grand tétras, du lynx boréal ou du balbuzard pêcheur. Leurs observations de terrain complètent les inventaires officiels, renforçant les connaissances sur les espèces menacées.

Ainsi, à travers la gestion durable, les protocoles scientifiques et la régulation, les chasseurs contribuent à maintenir la diversité spécifique, non seulement celle des espèces chassables, mais aussi celle des écosystèmes dans leur ensemble.

La diversité génétique : socle invisible de la biodiversité

1. Définition et rôle de la diversité génétique

La diversité génétique désigne la variabilité des gènes au sein d’une espèce ou d’une population. Elle conditionne la capacité d’adaptation aux changements environnementaux, aux maladies ou aux pressions sélectives. Une population génétiquement riche dispose d’une plus grande « plasticité évolutive », garantissant sa survie à long terme.

Chez les animaux sauvages, cette diversité dépend du brassage génétique permis par les échanges d’individus entre populations. À l’inverse, la fragmentation des habitats ou la réduction des effectifs augmente la consanguinité et la dérive génétique, conduisant à une perte de viabilité.

2. Menaces sur la diversité génétique

Plusieurs processus anthropiques affaiblissent la variabilité génétique :

->l’isolement des populations dû à la fragmentation des habitats (routes, zones urbanisées) ;

-> les réintroductions mal conçues à partir de petits effectifs ;

-> les sélections artificielles (recherche de trophées, croisements non contrôlés) ;

-> la pollution génétique par hybridation avec des espèces exotiques proches

Ces processus compromettent la capacité adaptative des populations à long terme.

3. L’action des chasseurs pour la diversité génétique

  • Maintien de la connectivité génétique

Les corridors écologiques aménagés par les chasseurs contribuent directement au brassage génétique. Les haies, zones tampons ou mares successives créent des continuités fonctionnelles où les espèces peuvent circuler et se reproduire entre populations. Ces infrastructures vertes préviennent la dérive génétique et favorisent la recolonisation naturelle.

  • Suivi et gestion des populations sauvages

Les chasseurs, via les plans de chasse et les comptages, maintiennent des structures de population équilibrées limitant les biais de sélection. Chez le cerf élaphe, par exemple, la réglementation des prélèvements évite la surreprésentation des grands mâles, préservant la diversité génétique des lignées.

  • Conservation des races domestiques de chiens de chasse

La diversité génétique ne concerne pas uniquement la faune sauvage : elle inclut également les races domestiques traditionnelles issues de la culture cynégétique. Des races françaises comme le Gascon saintongeois, le Porcelaine ou le Griffon nivernais sont entretenues par des éleveurs et utilisateurs passionnés. Leur préservation contribue au patrimoine génétique national et à la diversité fonctionnelle des chiens.

  • Contribution à la science génétique de la faune

Les fédérations des chasseurs collaborent régulièrement avec des laboratoires et l’OFB pour des analyses génétiques de populations de gibier (cerf, sanglier, lièvre). Ces études permettent de suivre les flux de gènes, d’identifier les sous-populations isolées et d’ajuster la gestion en conséquence. L’approche scientifique intégrée de la chasse durable favorise donc une gestion adaptative de la diversité génétique.

Une approche pragmatique de la biodiversité par les chasseurs

La chasse durable n’est plus une simple activité de loisir mais un outil de gestion écologique.

Les 3 niveaux de biodiversité écosystémique, spécifique et génétique forment un système cohérent et interdépendant. La dégradation d’un niveau affaiblit les deux autres. Les chasseurs, par la diversité de leurs actions, interviennent simultanément sur ces trois plans :

Niveau de biodiversité Enjeux principaux Actions cynégétiques associées
Écosystémique Maintien des habitats et continuités écologiques Restauration de haies, mares, zones humides ; corridors Ekosentia ; opérations « J’aime la nature propre »
Spécifique Gestion durable des populations et régulation Plans de chasse, ICE, Agrifaune, régulation des espèces
Génétique Maintien du brassage et de la variabilité Connectivité écologique, gestion démographique, conservation des races cynégétiques

 

Ainsi, la chasse durable n’est plus une simple activité de loisir mais un outil de gestion écologique reposant sur la connaissance scientifique, la responsabilité et la concertation. Elle s’inscrit dans les objectifs de la Stratégie nationale pour la biodiversité (2022-2030) .

Les actions de terrain menées par les chasseurs constituent un exemple de conservation intégrée où usage et préservation se rejoignent. En valorisant les territoires, en soutenant la recherche et en entretenant les différents milieux, ils participent activement à la sauvegarde du vivant.

Conclusion

Les chasseurs ont une responsabilité environnementale : veiller, gérer, transmettre.

La biodiversité n’est pas un concept abstrait, mais un tissu vivant qui relie les gènes, les espèces et les écosystèmes. Sa préservation suppose d’agir à ces 3 niveaux de manière coordonnée. Les chasseurs, de par leur connaissance fine des milieux et leur investissement concret, apparaissent comme des partenaires essentiels de cette gouvernance du vivant.

Par la restauration des habitats, la gestion adaptative des espèces et la préservation des patrimoines génétiques, la communauté cynégétique contribue directement à la résilience de la biodiversité française. Leur rôle dépasse le cadre de la pratique pour rejoindre celui de la responsabilité environnementale : veiller, gérer, transmettre.

En cela, la chasse contemporaine incarne une écologie de l’action, dans laquelle l’homme retrouve sa place au sein du vivant, comme acteur conscient de l’équilibre de la nature

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